Drrr ! D’ordinaire, j’aimais cambrioler chez des personnes riches, ou bien un gros musée parfois. Bref, un endroit où les gens avaient les moyens de me mettre un peu de challenge dans un gros bâtiment et avec un système de sécurité à la pointe de la technologie. Si je volais, ce n’était pas par besoin d’argent et envie, quoi que certains objets me fassent saliver. Non, je n’agissais surtout que pour le frisson, l’adrénaline, le plaisir coupable de relevé toujours des défis plus corsés. Depuis toujours, j’adorais mettre user de mes capacités pour réussir des prouesses qui faisaient trembler le mortel. Jouer les acrobates suffisait à les mettre en admiration.

Sauf que cette fois-ci, mes petits m’avaient rapporté des informations croustillantes. D’après l’une de leur petite ronde, une maison, plutôt modeste qui ne m’aurait pas attiré, abritait toute une collection d’artefact de l’âge d’or d’Egypte. Vous devez déjà assez bien me connaître pour savoir que j’étais une sentimentale. Connaitre l’existence d’objets liés à ma tendre jeunesse, aux époques glorieuses me ferait couler une larme de nostalgie. Et donc, cédant à la tentation, je m’étais précipité vers la petite demeure. Qui pouvait donc posséder tant d’objets aussi précieux ? Un collectionneur ayant les moyens ? Ou bien un dieu ? Mais ce qui m’intéressait le plus, fut de découvrir si oui ou non, une des reliques pourrait m’aider à retrouver ma famille. Comme un pendentif de géolocalisation par exemple.

Ainsi, ce soir j’enfilais ma tenue de soirée. Ma fameuse combinaison noire, avec un masque simple et une capuche qui dissimulaient mon visage. Jouant donc encore les acrobates, sautant de toits en toits, me dissimulant derrière quelques murs, panneau et boites aux lettres, je n’eus aucun mal à atteindre ma cible. L’endroit semblait calme et un simple jeu de griffe, suffisait à ouvrir la porte sans besoin de plus d’effort. Toutefois, j’avais bien pris la peine de la fermer délicatement derrière moi, pour masquer ma présence, mais je fusse trahi par un de mes petits sujets qui voulait juste suivre sa maîtresse. Et ça, je m’en rendais compte que bien tard.

Je vis les premiers objets en possession du maître des lieux. Quelques petites babioles, mais qui ravivaient en moi, l’espoir de trouver le reste. Cependant, je n’eus le temps d’aller bien loin. Le propriétaire apparaissait du coin de l’œil, sans doute alerter par le chat ou quelque chose d’autre. Ne voyant d’autres moyens de m’enfuir que par là où se tenait l’homme, je sautais silencieusement sur le plafond, m’accrochant pour éviter de me faire repérer. Le propriétaire passa juste en-dessous de moi.

Il avait une belle tête, plutôt mignon, mais l’air sévère. Le plan serait que je me faufile par derrière et parte par là où j’étais venu, ou le contourner et récupérer le butin sous son nez. Le problème fut qu’il bouchait le passage et à moins que mon pouvoir de téléportation ou d’invisibilité ne soit revenu, je devrais alors forcer le passage. Me laissant donc tomber, je venais le frapper de plein fouet. Il tomba au sol, moi le bloquant ainsi, l’empêchant de se relever.

"Désolé beau gosse, je ne fais que passer, ne fais donc pas attention à moi."

Si Ptah s’était réincarné en lui, ça ne me déplairait pas. Mais je doutais qu’il puisse s’agir de mon mari. Son regard était sombre, rien à voir avec celui de mon époux qui lui, était rêveur, un peu perdu et tendre. Un peu nigaud aussi, ce que j’aimais beaucoup en lui à vrai dire. Et donc, nous pouvions changer de forme autant que nous le voulions, mais le regard lui, ne changeait jamais. D’ailleurs, ne trouverez-vous pas cela comique de me voir scruter le regard de tous les passants comme un médecin un peu gauche pour retrouver celui de Ptah ? « Non, ce n’est pas vous ! Au suivant ! Presque mais non… » Et les gens qui se poseraient des questions, moi ca me faisait rire.

"Au passage, j’aimerais bien vous débarrasser de quelques bibelots encombrant, vous me remercierez plus tard."

Rare furent les fois où mes victimes purent apercevoir la maîtresse à l’œuvre. Et quand ce fut le cas, leur comportement n’était pas le même que le pauvre homme de ce soir. Courageux et arrogant, j’aimais ça. Mais le pauvre ne savait pas à qui, il avait à faire. Je n’étais pas une méchante fille, mon dernier meurtre remontait à la grande guerre civile des dieux, mais sur Caelesti, aucune personne ne fut écorchée à mort de mes griffes… Toutefois, la donne pouvait changer, et je pouvais faire subir bien des choses pires que la mort. Après tout, n’étais-je pas l’œil de Râ ? La redoutable Bastet qui, comme sa sœur jumelle Sekhmet, abattait les ennemis du Soleil ?

Toutefois, le maître de maison marqua un bon point. Pourquoi sa maison si modeste ? Ma petite Souad, tu semblais trahir tes habitudes. Enfin, il y avait bien une raison pour cela. Même si je suivais plus souvent mon instinct, mes actions n’étaient jamais dénuées de sens et de but recherché. Donc, en apparence, je pouvais paraître folle, mais au fond, c’était tout un plan qui se mettait en place. Chaque pas, chaque geste avait son importance. N’avez-vous justement pas remarqué, pour ceux qui en on au moins un, que votre chat arrivait toujours à ses fins ?

"C’est vrai que je préfère m’attaquer à plus coriace que vous. Pas de chance, c’est tomber ici. Mais je suis surtout venu pour récupérer ces artefacts égyptiens. Il me semble qu’ils ne sont pas à toi et je dois les rendre à leur légitime propriétaire. Ironique non."

Quand je parlais de légitimes propriétaires, je parlais de moi avant tout. Non que je fusse égoïste, mais je fus la seule divinité égyptienne à ma connaissance. Si j’en retrouvais un, qui soit de mon camp au moins, je partagerais volontiers ce petit trésor. Les statuettes, bijoux, coffrets et j’en passe, étaient des offrandes pour nous, un remerciement des mortels pour les bénédictions qu’on leur accordait. Et voilà que l’homme moderne s’amusait à profaner nos temples, nos possessions pour son bon plaisir. Le sacré fut souillé et servait de décoration d’amusement. Ceci me révoltait à un point dont vous ne pouviez pas imaginer. J’aimais les humains, en général. Ils pouvaient être si adorables, mais quand ils allaient loin, pas de quartier !

Ma victime ne semblait vouloir se laisser faire. Pas de « Pitié ! Prenez mon argent ! Prenez tout ce que vous voulez mais laisser mon en vie ? » Comme à la télé ? J’étais un peu déçu, mais pas trop. Surtout surprise de voir cet inconscient, vouloir se mesurer à bien plus fort que soit. Il fallait avouer qu’il était amusant, en plus d’être pas mal. Enfin, niveau beauté, rien n’égalait Ptah et son côté maladroit et timide qui faisait tout son charme. Si j’étais tomber sur lui, que ma moitié ce soit incarner dans ce corps, je ne dirais pas non, mais vue son caractère, il y avait aucune chance que ce soit mon mari.

"Oh ! Tu n’oserais pas frapper une femme ? Ce ne serait pas très gentleman comme comportement."

J’étais bien amusé par la situation tout de même. Il fallait bien trouver du positif dans cette histoire, surtout voyant que j’avais l’avantage. Par contre, je trouvais indécent sa manière de fixer mon pendentif, si c’était bien lui qu’il regardait. Serait le bon moment comique de l’Histoire, « Mes yeux sont plus haut ! Euh pardon je regardais votre… Collier… » Au lieu de mettre en pratique ce cliché qui faisait toujours plaisir, je choisissais une autre réplique tout aussi puissante et drôle :

"Ta vue est-elle rassasiée ?"

Hommes, dieux et monstres restaient toujours les mêmes. Et si même, leurs actions pouvaient être innocentes, lancé un sous-entendu suffisait à les perturber. Ceci était amusant à regarder, les voir devenir rouge, honteux, choqué… Ils pouvaient en être adorable. Je le faisais souvent avec Ptah. Au départ, je faisais ce genre de remarque un peu de façon méchante, voyant d’un très mauvais œil cette union, mais très vite, ce fut devenu un lien renforçant notre complicité. Voyons donc comment cet illustre inconnu comptait s’en sortir. Surtout, qu’allais-je faire de lui ? Peut-être l’assommer et me sauver avec ses reliques égyptiennes, cela pourrait être la meilleure des solutions.

Rare furent les fois où mes victimes purent apercevoir la maîtresse à l’œuvre. Et quand ce fut le cas, leur comportement n’était pas le même que le pauvre homme de ce soir. Courageux et arrogant, j’aimais ça. Mais le pauvre ne savait pas à qui, il avait à faire. Je n’étais pas une méchante fille, mon dernier meurtre remontait à la grande guerre civile des dieux, mais sur Caelesti, aucune personne ne fut écorchée à mort de mes griffes… Toutefois, la donne pouvait changer, et je pouvais faire subir bien des choses pires que la mort. Après tout, n’étais-je pas l’œil de Râ ? La redoutable Bastet qui, comme sa sœur jumelle Sekhmet, abattait les ennemis du Soleil ?

Cet homme était tout de même incroyablement poli en plus d’être diablement beau. Inutile de se mentir, il ressemblait beaucoup à ces gentlemen qui faisaient fantasmer de nombreuses femmes dans le monde à travers un roman à l’eau de rose. Ses manières à la fois distinguées, son côté sarcastique lui donnait bien plus de charme qu’il ne devrait. Toutefois, j’avais horreur des hommes qui se surestimaient. Il devait se croire bien plus malin qu’il ne l’était. Et faire tomber de leur piédestal ce genre d’individus, c’était comme les castrer. Pardonnez mes termes, mais j’y trouvais un certain plaisir à désillusionner ces mâles prétentieux. Pour cela, j’enseignais à mes anciennes disciples comment se défendre et venir à bout d’un mâle qui ne pensait pas plus qu’une sandale. Quoi que, dans le cas qui nous concernait, cet homme revêtait l’image que je venais de dépeindre, mais paradoxalement, je lisais dans ses yeux, une grande intelligence. Comme tout bon félin, il était de mise de rester sur ses gardes.

"Oh je voie. Une mentalité que je peux partager. On ne voie pas le propriétaire dans les environs, alors on se sert. Tu es un voleur alors ?"

Sa réaction suivante quant à la remarque sur quoi il regardait, me fit bien rire. Le pauvre homme tombait dans le panneau, bredouillant et cherchant à rattraper le coup. Qu’il était mignon comme ça. Et incroyable à quel point ce truc pouvait marcher à chaque fois. Rien qu’en quelques mots bien choisis, on venait de déstabiliser notre adversaire. Ce genre de chose pouvait mettre fin à une guerre, en empêcher même. En tout cas, cela eut le mérite de souligner son trait de caractère, étant celui de la politesse. Beaucoup de retenue, un certain franc-parler, un regard ténébreux… Il me fit bien penser à quelqu’un. Mais je n’arrivais pas à mettre un nom dessus…

L’inconnu enchaina sur nos pendentifs. Il avait remarqué le miens qui pendait toujours au coup, faisant partie de moi et dont je ne pouvais enlever. Mon fameux gamma, la source de mes pouvoirs, tout ce qui restait de mon ancienne vie était là, enfermer dans ce bibelot à la vue de tous. Pour vous, cela n’était qu’un pendentif qu’on pouvait trouver facilement sur Amazon, mais il n’avait rien à voir avec ces bijoux de contrefaçon. C’est alors qu’il m’avoua en avoir un et désirait me le montrer. D’abords suspicieuse, je lui roucoulais dans l’oreille :

"Une minute, nous nous connaissons à peine. Laissons-nous le temps de mieux nous connaitre. Serait-ce une autre de tes « acquisitions » ?"

Glissant mon doigt ganté le long de sa joue, je cherchais la soi-disant chaînette de son collier. Sans doute une pièce achetée dans une enchère, ou une Made In Taïwan, mais j’étais curieuse de voir de quoi il en retournait. Sans doute qu’une toute petite partie en moi, espérait voir un objet magique comme le mien. Depuis mon arrivée sur cette maudite île, je n’eus retrouvé grand monde de chez moi. A croire que ma « famille » était bien morte et enterrer sous le sable du désert. Enfin, s’ils étaient comme moi, cacher dans un corps de chaire, peux voir aucun ne chercherait à se manifester. Les humains étaient devenus si hostiles. Chaque siècle, leur espèce était de plus en plus dégénérative. Ils détestaient tout et tout le monde, et ont développés une certaine allergie envers ce qui était divin. Regardez, nous n’étions plus que des personnages de divertissement. Films, jeux, romans… Nous avions apporté beaucoup aux mortels, et à présent, nous ne valions plus rien pour eux…

Alors, on comprendra un peu pourquoi, je recherchais tant les miens. Il fallait des repères, du soutien surtout. Se reconstruire et voir comment évoluer pour l’avenir. Personnellement, j’ignorais comment je voyais le futur, mes projets n’allaient pas plus loin que retrouver ceux de mon panthéon, en priorité, mon père, mon mari et même mon fils… Malheureusement, chaque jour passer ici, me rapprochait d’un état d’esprit presque fataliste. De quoi croire que j’étais la dernière, maudite à une vie d’errance. Et pour cela, j’en voudrais à jamais à Amon. Si je parvenais à sortir d’ici, il n’y aura pas qu’Apep qui se retrouvera la tête tranchée.

"Et qui te dis que je ne connais pas leur propriétaire ?"

Une petite question qui pourrait bien lui faire rire. D’ailleurs, elle fut annoncée sur un ton humoristique, même si au final, il y avait du vrai dans ce qu’il fut dit. Mais, il n’avait pas besoin d’en savoir plus. Par contre, comptais-je vraiment restituer tous ces objets à leurs légitimes propriétaires ? L’Histoire des dieux était si compliquée, ce conflit entre nous n’arrangeait en rien. Et donc, si je devais tomber sur des adversaires de l’autre camp, je doutais fort que je rendrais le moindre objet. En réalité, je pensais surtout les garder comme souvenir d’un passé glorieux, me sentir moins seule. Cette guerre avait fait beaucoup trop de mal, j’étais d’accord. Un immense chaos en fut créé qui manqua de peu d’ébranler le monde. Pire que votre Seconde Guerre mondiale. Pourtant, elle répondait à une certaine injustice. Chez nous, en Egypte, l’Ordre en fut déjà ébranlé depuis que Râ eut cédé son trône à ce puéril d’Horus, manipuler par cette nuisible d’Isis. Ma place même de combattante du Chaos me fut prise par la suite et je ne vous disais pas quel beau bazar cela avait créer sur Terre. Les guerres se sont multipliées, des lignées illégitimes de souverains se sont succéder, la maladie, la famine, les invasions… Vous avez compris ?

Revenant à notre cible, ce dernier semblait vouloir jouer le jeu. D’abord timide, on aurait dit qu’il avait radicalement changer de caractère. N’étant pas dupe, je me doutais qu’il avait une idée derrière la tête. Cependant, j’aimais les hommes qui avaient de l’audace, malin et intelligent. Nous nous étions lancés dans un petit jeu de flirte, mais rien de bien sérieux, car c’était avant tout un jeu de dupe avant tout. Il fallait dominer son adversaire. Lui, devait chercher un moyen de prendre l’avantage et me mettre hors d’état de nuire, et moi, à filer d’ici dans dommage et si possible avec quelques babioles en guise de souvenir.

"Tu es mignon tu sais. Et si tu me disais ton petit nom ? Ça serait plus facile pour moi."

Je supposais qu’il devait porter un patronyme en vogue, qui avait de la classe, quelque chose de viril. Mike ? Jack ? Ian ? Derek ? Un prénom court mais cool. Mise à part ce détail, mes doigts ramenèrent entre lui et moi, ce que sa chainette reliait. Monsieur était véritablement un amoureux des artefacts, et celui qu’il portait autour du cou était bien particulier. D’ordinaire, c’était souvent un scarabée, un ankh classique, ou une représentation d’une divinité. Là, c’était un ankh, mais pas n’importe lequel. Celui-ci était rattacher à un dieu en particulier. Et cette faucille par-dessus, une représentation complexe qui cependant, ne laissait aucun doute à qui, il était lié. Ce bon vieil Anubis. Ce dieu psychopompe, pouvant être ennuyeux et qui puait de la gueule. Que de souvenirs. On comprendra alors, pourquoi je fus curieuse de savoir, comment notre ami a-t-il put se retrouver en sa possession, un tel objet, surtout que je sentais que cet ornement, n’avait rien de lambada.

"Aussi, j’aimerais savoir comment tu t’es retrouver avec ça ? Ce n’est pas du toc, et je doute qu’on le trouve dans un marché ou sur Ebay."

Peut-être devenais-je folle, cependant une part de moi eut comme un doute. Voyons cela comme de l’instinct, mais j’eus le sentiment que notre très cher collectionneur avait en réalité, quelque chose de familier. Au toucher de son bijou, je ressentais quelque chose d’électrique. Pourtant, il m’était difficile de dire à quoi c’était dû. A l’époque, je n’arrivais pas à reconnaitre le gamma de quelqu’un d’autre, et mes sentiments pouvaient être sujet à interprétation. Sans doute alors que voyant une relique du genre, réveillait de biens nostalgiques souvenirs, ou bien cet homme me faisait de l’effet. Haha ! Je plaisantais. Je maîtrisais bien mes sentiments, ce que je pouvais ressentir pour autrui et jusque-là, mon cœur ne battait que pour une seule personne.

Qu’allais-je bien lui répondre ? Connaitre les dieux égyptiens, oui, mais est-ce qu’un mortel à la conscience limité pourrait le comprendre ? Un humain, quand il ne pouvait saisir quelque chose, le désignait comme pure folie. Et on se demandait, comment ils étaient parvenus à bâtir d’aussi incroyables civilisations. En même temps, c’était à nous qu'ils le devaient. Toutes leurs premières connaissances et exploits, c’était grâce aux intentions parentales et maternelles pleines d’amour de leurs créateurs. Nous leur avions donné le feu, l’agriculture et l’architecture, ainsi que les arts. Et jouissant de leurs petits cadeaux, ils en vinrent à oublier leurs parents.

Mais, nous nous éloignions quelque peu de notre sujet. L’heure n’était pas donner une leçon à l’humanité, mais juste à celui-là qui je le rappelais, avait tout de même dérobé quelques biens, sous le couvert d’une égalité ressemblant plus à un trafic mafieux.

"Et si je dis oui, que me dirais-tu ?"

La réponse qui me venait, me paraissait quelque peu décalée, mais manqua de me faire rire au moins.

"Enchantée Darren. Mais, vous n’allez tout de même pas croire que je vais vous donnez mon nom ainsi. Ce serait inapproprié. Vous n’avez qu’à m’appeler Catwoman. C’est ainsi que certaines de mes victimes et journalistes m’ont surnommé."

Un surnom justement, plutôt bien trouver non ? Cliché vous diriez ? Mais attendez, qui a inspiré au final, l’idée d’une femme-chat ? Celle de la bande dessinée n’était pas la première allusion. Et si vous faisiez un minimum d’effort de recherches, vous verriez que cette image remontait à bien longtemps. Allons, je risque de créer des rageux, mais le film de Pitof l’a très bien souligné. Mon culte ne s’était jamais vraiment arrêté, continuant à faire fasciner sur l’idée d’une femme féline forte et indépendante. Bons, mes prêtresses et disciples ne se transformaient pas réellement en voleuses masquées, mais cela s’y rapprochait bien. Et au final, ce n’était que logique que l’on m’attribuait un titre qui venait de moi non ?

La suite de la conversation eut l’effet de me rendre perplexe. Il y avait beaucoup d’ambiguïté, des paroles pouvant être traduites de diverses manières, mais une seule interprétation écrasait les autres, tel un éléphant de guerre qui chargeait. Serait-ce possible que ce doute qui me nourrissait d’un espoir presque absurde se soit révélé vrai ? Quelques peu déconcertée, je libérais presque instinctivement Darren de ma prise, le laissant toute liberté de mouvement et de se relever. Sans doute était-ce une erreur, mais je comptais encore sur mes capacités pour le remettre à terre s’il n’était pas sage.

Sous entendait-il vraiment qu’il était un dieu également ? M’avait-il reconnu sous mon accoutrement ? J’eus le sentiment aussi d’avoir deviner sa nature, mais mon âme était en pleine lutte, savoir si c’était bien un dieu ou une créature, ou bien si je me faisais des idées, me mentant à moi-même car je ne supportais plus ce sentiment de solitude. Un chat était territorial, mais paradoxalement, il aimait la compagnie.

"Dis-moi donc qui tu es en réalité… Darren Wade."

Comme une formule du livre de Thot, cette phrase déplancha quelque chose en moi. Ce fut comme si la réponse m’apparaissait par magie dans mon cœur et mon esprit. Depuis notre rencontre, de nombreux détails me revenaient en tête, une succession d’indices qui s’assemblaient pour résoudre le mystère, apportant une réponse qui à présent, paraissait évidente. Qui était-il ? J’eus le sentiment de le savoir. Toutefois, au lieu de lui cracher son nom devant tout le monde, enfin nous deux vue que nous étions seuls, il fallait que ce soit lui qui le dise, lui qui justifie mes croyances, lui qui prouve et atteste, ce que nous savions déjà tous les deux.

Cette soirée prenait des tournures bien étranges. Ce qui ressemblait à un basique cambriolage, devenait une discussion quelque peu particulière, pour finir en rencontre des plus inattendues. D’ordinaire, je laissais sur le carreau mes victimes. Celles ayant eu la chance de me voir, n’eurent droit qu’à une remarque cinglante et un rire moqueur, pendant que je m’envolais de la fenêtre. Darren, lui, était une victime privilégiée. Non seulement, il put conserver avec moi, mais découvrir certaines choses. Et cette étrange aura, cette situation si inexplicable au départ, prit peu à peu tout son sens. Il ne lui a fallu que prononcer deux mots, deux noms aussi vieux que le monde pour que tout changeait à jamais.

Anubis… Bastet… Depuis combien d’années, je n’eus plus entendu ces prénoms. Enfin, vivre dans ce monde faisait que chaque jour durait mille ans. On me désignait sous l’appellation de Souad. Souad… Souad… Souad ! À tel point que Bastet faisait partie d’un passé presque révolu, un titre oublié dont je peinais à garder. Et voilà que comme une formule magique, nommer ces deux êtres les ramenaient à la vie. Les souvenirs, les sensations d’antan, les vieux espoirs, tout sortait du sable du néant, profitant de l’air de ce monde. Mon cœur semblait s’arrêter, la foudre venait de s’abattre sur moi. Impossible d’en revenir.

"Anubis… ? Anubis… ANUBIS !"

Je laissais exploser ma joie. Telle une enfant qui retrouvait sa parenté, je n’eus que le désire d’attraper dans mes bras, ce vieux camarade, ce patriote entre mes bras. Depuis si longtemps, je me sentais si seule sur ce maudit caillou au milieu de nulle part. Finissant par croire, que j’étais condamnée à la solitude ici sur Caelesti, abandonnant l’idée de croiser quelqu’un de familier. Et finalement, quelqu’un était présent. Une personne bien connue, qui rapportait l’espoir, la confiance que tout n’était pas perdu. Et ce n’était pas n’importe qui. Il s’agissait d’Anubis, le protecteur des morts, un des gardiens de l’Ordre comme moi ! Qui avait prit part dans la guerre aux côtés des Gardens, du moins s’en approchait ne voulant destituer le faux roi Amon… Et oui, tout me revenait en mémoire à présent.

"ANUBIS !!!" Grognais-je.

N’étions-nous pas ennemis à la base ? Ce retour à la réalité me fit quelque peu perdre mes moyens et d’un bon en arrière, je venais à assommer d’un coup de pied ma victime. Je pourrais en profiter pour m’en fuir et ne plus jamais recroiser sa route au final. Mais la curiosité et la rancune étaient bien trop puissante que la raison. Ainsi, je laissais là Anubis, ou Darren sur une chaise, lui faisant face. M’assurant qu’il eut reprit connaissance, je lui faisais donc face, assise sur un meuble, le défiant du regard.

"Désolé pour le petit coup, trop de rancune encore."

Faisant quelque chose qui pourrait choquer, je venais à retirer devant lui, mon masque (dont il ne s’agissait que d’une paire de grosse lunette en plastique jaune, et retirais ma capuche, dévoilant ma longue chevelure d’ébène tresser en longue queue de cheval. Etais-je folle de lui dévoiler mon visage ? Nous n’étions plus des étrangers après tout. Et je doutais qu’il aille comme ça porter plainte, déjà qu’il n’avait pas grand-chose contre moi.

"J’imagine qu’il est l’heure de se parler non ?"

Au moins, Anubis n’était pas du genre rancunier contrairement à moi. Il était la lune, et moi le soleil. Le jour et la nuit. J’eus libéré ce chacal de ses entraves, donner une grande chance de contre-attaquer, mais il n’en fit rien, restant toujours aussi courtois et sage. Peut-être était-ce un des traits qui à la fois me plaisait, mais surtout m’ennuyais chez lui. Aucune surprise, aucune originalité, Anubis pouvait être prévisible, un vrai papyrus ouvert. En tout cas, je n’allais pas m’en plaindre. Nous avions au moins tout notre temps ainsi, pour discuter et mettre les choses aux clairs. Avec un minimum de recul en plus, on pouvait se rendre compte que notre vieille guerre commençait à perdre tout son sens. De plus, je ne voulais pas me battre avec le seul dieu de chez nous, que j’avais retrouvée. Comme quoi, la solitude poussait à fraterniser facilement avec autrui, même votre pire ennemi.

Evoquant la vie nostalgique de notre foyer, mon regard se perdait dans la pièce sombre, évitant de croiser sur le coup, celui d’Anubis. Parler de son ancien foyer n’était pas évident. Trop de bons et de mauvais souvenirs qui se mélangeaient, donnant un goût indéfinissable.

"Oui… Un peu."

Oui j’avais des temples, tous mes pouvoirs et ma famille. Richesses, puissance, admiration, j’avais presque tout pour vivre heureuse. Mais les choses dégringolèrent tout de même. Cela avait commencé depuis le règne d’Osiris, et eut un coup fatal sous Amon. Tout mon prestige, tout ce qui fit mon bonheur, s’en vola quand ce dieu fourbe prit le pouvoir. Jadis ancienne déesse puissante et respecter, j’étais cantonnée dans de petits sanctuaires comme une vulgaire criminelle en résidence surveillé. Mon père perdit tout son prestige, mon rôle sacré fut donné au premier partisan de ce dieu usurpateur. Mon foyer n’était plus ce qu’il fut jadis et ma famille proche… Commençait à se détruire à cause d’Amon avant même que je n’entre en guerre contre lui. Et Anubis… Anubis lui avait soutenu ce tyran.

"Si nous nous sommes trouvés, c’est qu’il y en a d’autres. Rebellious et Gardens envoyés ensemble sur cette île et il ne faut pas chercher bien loin pour comprendre au final, que c’est l’œuvre de ces prétendus dieux-rois. J’aurais cru que tu l’aurais déjà deviné mon beau."

Anubis n’était peut-être pas Thot, mais j’aurais imaginé qu’il aurait déjà percer ce mystère à la manière de Sherlock Holmes. Enfin, on le disait sage et réfléchit, j’eus toujours du mal à le constater. Nous verrons bien. Me levant, je m’approchais de lui, le dominant de toute ma hauteur, alors qu’en réalité, il était bien plus grand que moi, pouvant le prouver s’il se levait aussi. Mon regard changea pour devenir celui du défi, de l’accusation. Oui, notre situation ne permettait plus trop que nos vielles rancunes trouvent place. Hélas, ni lui ni moi ne possédions le pouvoir de soigner nos blessures par magie divine.

"Et quant à laisser notre conflit de côté, c’est facile à dire. Ce n’est pas toi qui a tout perdu à cause de ton maître. Tu n’as pas perdu père, mari et fils. Tu n’as pas été viré de ton poste pour faire plaisir à un sale gosse qui voulait faire plaisir à ses amis. Non, toi tu as très bien sut jouer le bon toutou obéissant qui soutenait tout le monde pour garder ton nonosse."

Etrange, car l’accusant de léche-bottisme, c’était le canin qui n’était pas fidèle à son premier maître, mais le félin si. Un monde à l’envers il fallait croire. Tourner la page, c’était difficile dans pareil circonstance. On ne pouvait pas demander à quelqu’un d’oublier sa peine, l’injustice dont elle faisait preuve. C’était comme dire que jamais, on entendrait parler de son malheur, que jamais, on lui accordera la moindre justice, que les coupables s’en sortiront.

J’étais partagée entre la colère et la fatigue. Qu’est-ce qu’Anubis pouvait m’insupporter. Nous étions tellement opposés lui et moi. L’un était aussi froid que ses momies et les âmes qu’il guidait. L’autre, aussi explosif et brûlante que le soleil même. Un prévisible, l’autre surprenante. Et pourtant, cette différence du temps jadis quand mon père régnait sur le monde. Nous avions chacun notre rôle, nous nous respections, ce genre de chose. Puis, tout avait changé quand on usurpa le trône. Des clans se sont créés, les dieux ont vraiment commencé à sa chamaillé à cette époque. Et moi, voulant restée fidèle à mon maître, je dus me voir m’opposer parfois avec violence, contre ceux qu’on pouvait dire « frères ».

En tout cas, la tension qui existait entre nous, eus du mal à trouver un moment de repos. Nous sentions cette dernière montait. Toujours trop de rancune, trop de souffrance supportée. Une famille déchirée, des trahisons… En même temps, je devais admettre qu’Anubis avait raison sur un point. Parmi tous les dieux, il était celui qui fut le moins connu pour se laisser corrompre. Le pouvoir ne l’avait jamais intéressé. Et donc, je supposais que s’il prêtait jadis main forte à Isis et Horus, c’était par fidélité envers ceux qui l’avaient élevé. Il était tout aussi fidèle envers ceux, s’étant montré aussi bon

Par contre, l’entendre dire qu’il compatissait ne me procura aucun réconfort. Au contraire, mes membres se raidirent, mon sang bouillonnait. Lui compatir ? Lui comprendre ma douleur ? Voilà qui était plus que déplacée, pour restée correct. Me levant devant lui, j’approchais avec désinvolture, le foudroyant du regard. Et, avec mon doigt, je fis glisser une griffe que j’eus faite sortie sur sa gorge, simulant un égorgement réalisé par une caresse morbide.

"Oui, peut-être le devrais-je. Tu dis compatir, mais tu n’as rien fait quand nous connûmes la disgrâce. Alors dis-moi beau ténébreux, n’as-tu jamais éprouvé de la rancœur contre Seth ? L’envie de lui planter sa lance en plein cœur et lui faire payer ? Même, juste y penser ?"

La vengeance, j’y connaissais un peu. Normalement, c’était ma sœur Sekhmet qui s’en chargeait. Mais vue nos différends, en tout cas pendant des siècles, des femmes venaient à mon temple à Bubastis, pour me prier de les protéger, de les venger même de ceux leur causant du mal. Je me souvenais de chacune de leur supplique, comptais chacune de leur larme et entendant encore le cri de douleur dans mon crâne. À chaque fois, je répondais d’une manière ou d’une autre présente pour apporter la justice attendue. Bastet, déesse du foyer et de la joie, mais protectrice des femmes. Enfin l’une d’elle. Et là, c’était à mon tour d’exiger la justice. Mais qui m’entendrait ? Qui m’apporterait le réconfort souhaité ?

Alors, je connaissais que trop bien ce sentiment. Parallèlement, quand j’apportais de la joie, je sentais la détresse d’autrui. Comme un horrible parfum pire que celui du natron, je devais respirais tous sentiments négatifs afin de le transformer en joie tel un antidépresseur. Et donc, je savais que la rancune tenait à tout le monde sans exception. Mortels et dieux, tous le monde voulait faire payer à quelqu’un. Et Anubis, né d’un adultère, rejeté par sa mère, son père assassiné, mais heureusement pour lui ressusciter, n’avait-il aucune colère en lui ? Son propre cœur aurait droit d’être en colère, de vouloir faire souffrir ceux l’ayant mal mené. Qui ne comprendrait pas ?

Voilà qui devenait enfin intéressant. Anubis, le dieu connu pour sa froideur et son image détachée du monde, dévoila enfin une partie de lui si longtemps refoulait. L’injustice, quand elle nous touchait, impossible de rester impassible et sortir de beaux discours. Même s’il tentait de garder la même mentalité que depuis le début, il trahissait ses émotions. La colère, la rancune, la vengeance, tout remontait en lui. Et un sourire de triomphe orna mon visage. Pas grave s’il ne se rangeait pas complétement à mon avis. Il l’était à moitié, soumis à ses émotions, comprenant maintenant ce que nous ressentons nous autre.

Que je me souvenais de cette histoire-là plus célèbre, le meurtre d’Osiris. Isis venait d’usurper le trône de Râ pour son frère et époux. Le dieu soleil devait à cause d’un odieux chantage, céder le pouvoir à cet empoté d’Osiris. Et quand ce dernier fut assassiné, expédier au royaume des morts, et qu’Horus son fils désirait récupérer le pouvoir, Râ en a profité pour lui barrer le chemin, avec mon soutien. À cette époque donc, j’étais aussi opposée à la famille d’Anubis, voir à lui-même. Même si comme il le disait, ne prenait vraiment partie dans ces histoires.

Il était clair que j’aurais aimé voir le favori de notre père sur le trône, plutôt que cet enfant pourri gâté. Et pour tout vous avouer, que lors de l’assassinat, je fus en peu partagée. Au départ, nous tous prirent peur quand Seth l’enferma dans cette boîte. Mais quand nos esprits s’apaisèrent, j’y éprouvais un certain plaisir à voir ce profiteur hors-jeu, et sa snobe d’épouse exilée. J’avais envie d’y danser, mais la réaction de père m’avait quelque peu laissée perplexe. Il n’était ni heureux, ni en colère. Comme Anubis, il était aussi froid et immobile que ses statues. Alors, je dus calmer ma joie, et restais discrète, poursuivant ma mission comme si de rien n’était.

"Justement, je voulais m’assuré que tu avais des sentiments comme nous tous. Et non être aussi mort que tes momies."

Me levant, j’approchais avec grâce, ma main dépourvue de ses griffes sur son beau visage. Il fallait avouer que parmi toutes les incarnations possibles, et connaissant tout de même le personnage, Anubis ne fut pas moquer sur ce coup-là. Ses traits étaient durs, son regard noir comme la nuit. Il cherchait à manifester de la pacificité, hélas on sentait bien son corps être tendu, ses muscles crispés, la colère qui grondait dans ses entrailles. Il fallait avouer que j’aurais cru que sa colère se porterait surtout sur Seth, et non sa mère. Cependant, je pouvais comprendre cette rage. Une mère qui abandonnée pour son propre bien le fruit de sa trahison. Un enfant innocent, un chaton qu’on laissa dans les roseaux, à la merci des bêtes sauvages. Normal qu’il tenait un peu à Osiris et Isis, ses seuls parents, l’ayant accepté et élevé.

Ma face fut adoucie, et mon esprit se plongea dans une grande réflexion. Anubis était peut-être sage des fois, mais des choses semblèrent lui échappaient tout de même.

"S’il le faut oui. Chaque voleur ne doit-il pas être punis ? Le meurtrier sanctionner ? Si on laisse ces agents du chaos agir à cause de leur nombre, comment les choses se finiront-elles ? Nous avons tous un rôle à jouer. Si on l’abandonne, le monde s’effondre. Comme ce fut le cas avec tous ces voleurs de trônes. Serais-tu las mon chère Anubis, de cette fonction sacré qu’on nous as donné ?"

Nous étions là oui pour préserver l’équilibre. Chacun avait son rôle, et tant qu’il était respecté, le monde allait pour le mieux. Mais brisez cet équilibre et tout partait en vrille. Les repères sont perdus, les guerres et les fléaux tombant sans arrêt… Plus rien n’avait de sens, et moi, je voulais tout rétablir, que tout reprenait forme enfin. Car contrairement à certains, je ne me terrais pas, faisant comme si de rien n’était, cherchant une pseudo vie de mortelle. Que j’avais envie de reprendre le combat, combien je comprenais le plaisir que trouvait Sekhmet à rependre la mort et la destruction. Si j’étais à nouveaux sur un champ de bataille et que je pouvais mettre en pièce entre mes griffes mes ennemis… Hélas, ce ne serait pas pour tout de suite. Un long soupire s’échappa de ma poitrine.

"Tu as su me démontré tout de même qu’il était possible dans une moindre mesure de continuer d’avancer. Mais… Ne t’attends pas à ce que je change de position comme ça. Beaucoup trop de fautes furent commises."

Il repoussa ma griffe. Un geste qui pouvait m’offenser, me faisant sentir violemment rejeter. Mais, Anubis s’exprima toujours avec douceur, gardant un instant sa main entre les siennes, faisant sentir la chaleur venant d’un dieu connu pour sa froideur et son goût de côtoyer les morts. Il fallait l’avouer, je ne connaissais vraiment pas Anubis. Pourtant, contrairement à beaucoup de monde, je l’eus côtoyé plusieurs fois en deux mille, vois trois mille ans. Cependant notre relation était plus proche du « Professionnel » que de l’amical ou familiale. Était-il possible que je me sois trompée à son sujet depuis le début ? Le voyant si passif et n’ayant pas défendu une justice à la quelle j’attendais, c’était un colabo ?

"La mort est une conséquence de leurs actions. Une punition que les dieux ont droit d’infliger quand leurs enfants mortels viennent à les offenser… Mais tu as raison je dois l’admettre. Je préfères voir Amon déchu et humilier, que son vrai visage soit dévoilé, que mort et martyr."

On ne prêtait pas à Anubis l’image d’un sage pour rien. On ne pouvait pas être d’accord avec lui sur tout, mais ses arguments ne manquaient pas de sens, et obligeaient à la réflexion. Son regard si sombre et profond, me fit voir quelque chose que j’ignorais en lui. Serait-ce de la peur ? De la souffrance ? De la pitié ? J’ignorais encore ce que je découvrais chez lui, mais ceci remua mon âme à un tel point, que le feu ardent de ma colère contre Anubis, semblait se calmer peu à peu. Malheureusement, tout le ressentiment que je pouvais ressentir ne pouvait disparaitre par enchantement. Trop d’injustice, la perte des êtres qui m’étaient chers. J’avais le sentiment que si je suivais ses conseils, que j’oubliais ma rancœur, ce serait manqué de considération envers ma famille, que je trahissais chacun d’entre eux. Mari, fils, père… Que je les abandonnais.

Après sa dernière tirade, mon regard se perdit dans la pénombre de la pièce. Du respect, abandonner cette violence qui eut enivré ma sœur. Comment faire ? Comment agir pour ne pas trahir ceux que j’aimais, et me défaire de cette drogue qui me brûlait les veines depuis si longtemps. Anubis paraissait si idéaliste. Perplexe, je renfilais mon masque sur le visage, recouvrant ma tête de ma capuche, comme au moment où j’étais entrer chez lui.

"Ne crois pas que cela se fasse comme ça. Trop de torts furent commis."

L’abandonnant, je me dirigeais vers une fenêtre que j’ouvris, laissant entrer un souffle frais dans toute la pièce. Non compliqué de deviner mes intentions. Un dernier regard pour le propriétaire des lieux :

"Désolé pour le dérangement. Jolie collection au fait, j’étais ravis de t’voir revue Anubis."

Et d’un bon, je sautais par l’ouverture, disparaissant dans les ténèbres. Après quelques sauts acrobatiques, je mis un maximum de distance entre la maison de Mister Wade et moi, m’amusant de sauter de toit en toit, fuyant comme si le soleil qui n’allait pas tarder à se lever, allait me consumer sur place si j’étais encore dans les parages. Mais pendant ma folle course, mon cœur fut au combien bouleverser. Retrouver un des miens n’apporta pas la joie tant espérer. Ce fut bien le contraire, mon âme s’agitait, de vielles douleurs que j’eus cru maîtriser, me firent pleurer intérieurement, me poussant presque à craquer.

Dans un dernier saut grâcieux, j’arrivais enfin sur le toit de ma propre maison, à quelques minutes du levé de soleil, où là, je me laissais enfin à quelques larmes bien violentes. Un sanglot s’échappa de ma gorge, mes membres tremblèrent comme pris de spasme. Pourquoi ? Pourquoi un si cruel destin ? J’aurais voulu que Râ soit là, il m’aurait conseillé, aider. Mais j’étais seule, abandonnée. Et les mots d’Anubis agirent comme une armée assiégeant un fort. Les armes lourdes tentaient de défoncer mes murs et ma porte. Je voulais résister, mais je sentais que ma force n’était plus aussi grande qu’avant.

C’est alors qu’un miaulement me fit momentanément oublier mon désarroi. Un de mes sujets était venu me rejoindre, miaulant et voulant apporter du réconfort à sa maîtresse. De ma main ganter, je vins à caresser le long du dos vélums de ce félin qui ronronner contre moi. Chez nous, chaque chose qui vous arrivait était un signe. Du réconfort en pareille situation, peut-être qu’au final, tout n’était pas si sombre…